Présidentielles 2017 : abandon du clivage politique
Les « démocratiseurs » ! Ainsi Jean-Marie Hordé appelle-t-il tous ceux qui, en toutes matières, abolissent les différences, en les nivelant.
Les voici, de nouveau à l’œuvre pour tenter d’abolir le clivage gauche/droite. Ils ont un candidat : Emmanuel Macron. Au soir du premier tour, ils pensaient avoir réussi leur « coup d’État », puisque, conformément à leurs calculs, Marine Le Pen devait être qualifiée comme l’adversaire le plus facile pour Emmanuel Macron.
Et pour y parvenir, ils durent créer un immense désordre politique mais qui, contre toute attente, ne rend pas si assuré ni même aisé la victoire calculée d’Emmanuel Macron.
Car Marine Le Pen n’est pas une proie facile. Et les ralliements « inattendus » de Marie-France Garaud (gaulliste historique et ex-conseillère de Georges Pompidou), la prise de position de Christine Boutin et surtout l’impact politique du pacte de gouvernement conclu entre Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan (gaulliste) viennent sérieusement compliquer les calculs rapides.
D’autant que, au second tour, deux causes augmentent les incertitudes. Tout d’abord, les abstentionnistes, si nombreux au premier tour (10 millions). Ils semblent encore tentés de s’abstenir, tout comme beaucoup d’électeurs de la France insoumise (FI), du Parti socialiste (PS) et des Républicains (LR) qui entendent voter soit « nul », soit « blanc », soit Marine Le Pen. Au demeurant, jamais, sous la Ve République, autant de citoyens affichent l’intention de ne pas choisir entre deux finalistes à une élection présidentielle (hormis lors du second tour des présidentielles de 1969 qui a vu une baisse de 9% de la participation).
En dé-clivant la France, en martelant le « ni gauche ni droite » ou « la gauche et la droite », les « démocratiseurs » politiques ont grandement facilité la tâche à Marine Le Pen.
En second lieu, nos « démocratiseurs » ont vilipendé et décrédibilisé les partis de gouvernement (PS et LR). Alors, pourquoi réclament-ils le Front républicain composé des partis qu’ils veulent abolir ?
Aussi, pour tous, le choix, en effet et à présent, est pénible, cruciale même. Car, avec Macron, c’est en klaxonnant qu’on fonce en zigzaguant dans le mur (rabotage des acquis sociaux, démantèlement du code de travail, soumission à la Commission européenne, etc.). Et avec Marine, on fonce droit dans le mur en pleurant (conflits communautaires, perturbation monétaire, etc.).
En tous les cas, quel que soit le vainqueur du second tour, il ou elle ne sera qu’un Président ou une Présidente faible, c’est-à-dire sans grande marge législative (majorité complexe, chaotique ou relative) et avec un peuple français si profondément divisé. Et si Emmanuel Macron l’emportait avec moins de 55% des voix, il ne sera qu’un Président potiche. Son score est plus déterminant que sa victoire.
C’est pourquoi, les législatives de juin prochain offriront deux grandes occasions : tout d’abord, celle de rétablir le clivage gauche/droite ; ensuite, celle de donner à la France, un Premier ministre qui pourrait être de gauche et constituer un efficace contrepoids républicain face à Emmanuel Macron ou point d’équilibre démocratique face à Marine Le Pen. Une cohabitation se profile.