L’âne qui perd ses reliques
Il y a quelques mois, il me plût de mettre en ligne une fable fameuse de notre inépuisable de La Fontaine : L’Âne portant des reliques. Et chacun, sans grande peine, comprit alors qui était l’Âne d’Épinay que je désignais et le sens du persiflage que j’entretenais.
Rappel : dans la fable, le « baudet » et le « magistrat ignorant » croient que le peuple les adorent pour eux-mêmes. Or ils se trompent. Ce sont les belles « reliques » de l’Âne et le symbole de la « robe » du magistrat qui sont vénérés. Sans ses « reliques », l’Âne n’est rien. Sans sa « robe », le magistrat n’a aucun pouvoir.
Il en va ainsi des élus de droite et d’extrême-droite d’Épinay-sur-Seine qui croient être appréciés par les Spinassiens, alors qu’ils ne sont craints qu’en raison du pouvoir attaché à leur mandat. C’est donc leur mandat, et non eux-mêmes, qui sont vénérés. On comprend dès lors pourquoi la possibilité de perdre leur mandat leur procure tant d’inquiétudes jusqu’à en perdre tout contrôle.
Il manque une suite à la fable de La Fontaine. Combien j’eusse souhaité qu’il donna un enchaînement à son texte, en parlant – comme il savait si bien le faire – des états d’âme de l’Âne quand celui-ci perd ses reliques.
En observant les inquiétudes et le désarroi des élus locaux de droite et d’extrême-droite, je voudrais prolonger l’œuvre du fabuliste, en décrivant dans quel état se plonge l’Âne quand il commence à perdre ses reliques.
- Tout d’abord, ne comprenant pas la désamour de son peuple, l’Âne cherche à se rassurer. Pour cela, il réunit tous les siens, ânons, cabris et autres animaux de basse-cour qui, tous en chœur, commencent par se moquer de son adversaire. Mais l’Âne, difficile de caractère, ne se laisse pas convaincre. Alors, les flatteurs et les bonimenteurs combinent un nouveau stratagème pour lui faire croire qu’il est trop aimé du peuple : 1.300 noms en guise de soutien. Mais le mensonge public est vite dévoilé et fait l’objet de railleries. Alors l’Âne se décourage, d’autant plus qu’il voit son adversaire réussir ses rencontres publiques, ses réunions d’appartement et publier des pamphlets et un bilan qui est le miroir de ses échecs.
- Il se met à trembler à l’idée de perdre ses « reliques », symboles de son prestige. En conséquence de quoi il se fâche, invective, éructe, se calme, se déchaîne en vociférant. Il se met à distribuer des images de lui, mais rien n’y fait.
- La panique s’empare de son entourage, dont quelques « crétins » injurient des jeunes militants auxquels ils ne peuvent objecter des arguments dans un débat serein.
Ah « reliques », quand tu les tiens ! Ah « reliques », quand tu les tiens si bien enchaînés ! L’idée de ne plus pouvoir vous porter au cou les plonge déjà dans une peur panique. Dans une démocratie, seuls les anti-démocrates craignent l’alternance.